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ALHOURIYA
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6 janvier 2009

Alternance paisible au Ghana Election. Le président vaincu a félicité l’opposant John Atta-Mills pour sa victoire.

THOMAS HOFNUNGLe nouveau président l’a remporté, samedi, avec 50,23 % des suffrages contre 49,77 % à son rival, soit seulement 40 000 voix d’écart, selon les résultats définitifs livrés par la commission électorale. Tandis que le vainqueur proclamait sa volonté d’être «un président pour tous» , le vaincu le félicitait aussitôt et s’engageait à jouer un «rôle constructif pour l’avenir de la nation». Mais où s’est donc déroulée une élection aussi paisible ? Pas en Europe, comme certains pourraient être tentés de le croire, mais en Afrique de l’Ouest. Plus précisément au Ghana, une ancienne colonie britannique indépendante depuis 1957 et qui fait aujourd’hui figure de modèle de vertu démocratique sur le continent. Une success story propre à ébranler les convictions des afro-pessimistes les plus farouche

Pour l’opposant John Atta-Mills, un juriste de 64 ans, formé en Grande-Bretagne et surnommé «prof» dans son pays, la troisième fois aura été la bonne. En 2000 et 2004, cet ancien vice-président avait été battu à deux reprises. Sa victoire, arrachée vendredi après le vote retardé d’une ultime circonscription - celle de Tain, dans l’ouest du pays - met fin à huit ans de pouvoir du Nouveau parti patriotique (NPP) de John Kufuor, le président sortant. Le Ghana, un pays de 23,5 millions d’habitants, sera désormais dirigé par le Congrès national démocratique (NDC), qui a également fait basculer la majorité du Parlement lors des législatives du 7 décembre. Le candidat du NPP, Nana Akufo-Addo, a pointé du doigt des irrégularités ponctuelles, sans contester véritablement sa défaite. Après huit années d’opposition, le NDC reprend les rênes du pays. Le Ghana connaît ainsi sa deuxième alternance en moins d’une décennie.

 

Discret. Sur un continent dont l’actualité de ces derniers mois a été marquée soit par la reprise de conflits sanglants (en République démocratique du Congo), soit par des explosions de violence liées à des scrutins contestés (au Kenya) ou encore par le refus des dirigeants en place de reconnaître leur défaite et de céder le pouvoir (Robert Mugabe au Zimbabwe), il démontre qu’il n’y a pas de fatalité en Afrique. La bonne tenue de ce scrutin doit beaucoup au chef de l’Etat sortant, qui fait de plus en plus figure de sage dans la région et sur lequel la diplomatie française s’est fortement appuyée ces dernières années, notamment pour tenter de résoudre le conflit dans la Côte-d’Ivoire voisine.

Elu en 2000, puis réélu quatre années plus tard, cet homme discret a refusé de céder à la tentation fortement répandue en Afrique de modifier la Constitution pour pouvoir se maintenir. Durant ses deux mandats à la tête de l’Etat, il est parvenu à consolider la démocratie dans un pays qui a, lui aussi, connu des décennies d’instabilité. En 1957, le Ghana était devenu le premier pays d’Afrique de l’Ouest à acquérir son indépendance. Au même moment, le «père de la nation» ivoirienne, Félix Houphouët-Boigny, faisait un choix rigoureusement inverse : il proclamait à l’adresse du premier président ghanéen, Kwame Nkrumah, sa volonté de rester dans le giron de la puissance coloniale française. «Un pari vient d’être lancé entre deux territoires, l’un ayant choisi l’indépendance, l’autre préférant le chemin difficile de la construction avec la métropole d’une communauté d’hommes égaux en droits et en devoirs […] Que chacun de nous fasse son expérience […] et dans dix ans, nous comparerons les résultats.»

Jusqu’au début des années 90, l’Histoire a semblé donner raison à l’Ivoirien, dont le pays a connu un miracle économique, se hissant au premier rang des producteurs de cacao, avant de sombrer dans le chaos. Le Ghana a connu une trajectoire presque inverse : après plusieurs coups d’Etat, puis vingt ans de pouvoir sans partage de l’ancien pilote militaire, le fantasque Jerry Rawlings, il s’est assagi. Homme de dialogue, John Kufuor a notamment su calmer les tensions ethniques très fortes dans le nord, où des incidents sanglants ont encore éclaté en 2002.

Pétrole.Tout n’est certes pas parfait dans l’ancienne Gold Coast britannique, riche en minerais (en particulier en or), où règne une corruption tenace, mais le pays attire de nombreux investisseurs étrangers. On y a découvert du pétrole off shore, dont l’exploitation devrait démarrer en 2010. Cinquante ans après la profession de foi de Félix Houphouët-Boigny, le contraste n’en est que plus saisissant entre l’élection tranquille de John Atta-Mills, ce week-end, et l’incapacité des Ivoiriens à organiser un scrutin présidentiel depuis octobre 2005.

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